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Echos familiaux du Forum Social Mondial de Dakar

Je rentre de ce Forum Social Mondial à la fois touchée, émue et enthousiaste de la formidable vitalité et énergie des personnes et des associations que nous avons rencontrées. Je suis également plus consciente des maux de la planète que subissent encore plus violemment les plus pauvres.

Enthousiaste ! Quelle énergie !

Les femmes africaines doivent, pour survivre, vivre ensemble dans une grande solidarité et être combatives. « J’ai vu des femmes mourir de soif, des animaux mourir de soif ; je vois des femmes qui souffrent, qui font des kilomètres rien que pour le petit déjeuner. Quand on parle de l’eau il faut bien associer l’eau potable. Il faut travailler en synergie, se baser sur les expériences les uns des autres » témoignait une femme sénégalaise dans une association.

Inventives !
Les femmes de Casamance associées « pour le maintien des semences paysannes » et contre l’implantation des OGM. Nous avons rencontré à Dakar avant le forum des femmes associées en GIE ( 300 personnes) fières de vivre de leur tannerie qu’elles font dans des conditions difficiles et dans un environnement indescriptible. Et une association sénégalaise « pour la défense de l’enfant et de la femme » en réseau avec 15 autres groupes, tous membres d’ENDA, qui lutte contre l’excision par des campagnes d’éducation et de plaidoyer et procure des activités économiques aux femmes victimes de violences.
Au village des associations on découvrait des centaines d’associations africaines, mais aussi du Brésil, de Corée, beaucoup réunies en collectifs, appuyées par des ONG européennes.

L’Eglise aussi était complètement partie prenante de ce forum
L’évêque de Dakar a eu un engagement très fort lors de la messe précédant l’ouverture. Le CCFD avait permis la venue de 30 de ses partenaires d’Afrique, de Palestine, d’Asie et animait avec d’autres ONG des ateliers sur les paradis fiscaux, les migrants, l’accaparement des terres. Le Secours Catholique-Caritas France avec les Caritas de tous les continents avait une délégation de 130 personnes plus particulièrement impliquée dans les problèmes des migrants.

La Solidarité des migrants
200 millions de migrants par an à travers le monde dont 2/3 internes aux pays du Sud. C’est à Goré sur l’île d’où étaient emmenés les hommes en esclavage qu’ils ont conclu leur réflexion de 2 ans par une « charte des migrants » réclamant le droit à la libre circulation et à la libre installation, droits inscrits dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Ce Forum nous a permis de mieux connaître de l’intérieur les problèmes des pays du Sud, non pas « pauvres » mais « appauvris ». Ce sont eux qui en témoignaient, j’en cite quelques uns :

  la sécurité alimentaire des peuples  : plus que jamais elle sera assurée par l’agriculture paysanne et le savoir faire paysan ; mais elle est menacée par l’agriculture intensive, par la pénétration des OGM, par la spéculation sur les denrées alimentaires, par l’accaparement des terres. Les pays, les multinationales achètent massivement des terres en Afrique et Amérique latine pour des cultures alimentaires qui pourront donner lieu à spéculation, ou pour les agrocarburants. Cet accaparement devient massif et très inquiétant, il provoque un exode rural et une paupérisation accrue, et à terme un épuisement des sols.

  Le problème de la gouvernance des pays  : le Forum a applaudi le départ de Moubarak, mais la question de la gouvernance est essentielle.

  L’évasion fiscale  : ce sont 800 milliards d’euros par an qui échappent aux pays producteurs dans des paradis fiscaux. Le CCFD est moteur dans la campagne « www.stopparadisfiscaux.fr », à ce jour 15 pays sont engagés dans le plaidoyer « End Tax Haven Secrecy » pour demander que le G20 exige de la transparence de la part des multinationales, exigence que 4 régions de France ont décidé d’engager vis-à-vis de leurs fournisseurs.

  Les migrations  : on a vu à Dakar l’endroit d’où partaient les pirogues pour les Canaries, on a entendu le témoignage de l’association Migreurop qui dénonce les exactions de Frontex mandaté par l’Union Européenne pour empêcher l’émigration à travers le Sahel et le Maghreb, le témoignage de ceux qui ont été renvoyés dans leur pays, l’Afrique du Sud confrontée à une très forte migration.
Peu d’Etats ont une politique respectueuse de la dignité, de l’humanité des migrants et c’est un vrai combat.

  L’implication de notre mode de vie sur les autres . : l’accaparement de nombreuses ressources minières d’Afrique et d’Amérique latine pour notre consommation est source de guerre (en RDC), de maladies, de pollution de l’eau, d’appauvrissement des sols. La culture intensive de soja pour nourrir notre bétail, les agrocarburants pour nos voitures chassent les familles paysannes.

Oui rien ne changera là-bas si rien ne change ici, à cette condition

« Un autre monde est possible »

Mido Croquette